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Lorsque l’on est face au diagnostic d’une maladie chronique telle que l’endométriose, nous pouvons rapidement nous sentir désemparées et impuissantes. Il est vrai que ce n’est jamais une chose simple. Lors de mon propre diagnostic, je me souviens avoir eu l’impression que ma vie était finie : plus jamais je n’allais pouvoir vivre normalement. J’avais un sentiment de fatalité, mon existence ne m’appartenait plus. L’acceptation était donc difficile.
L’acceptation, un mot, un concept, paraissant si simple. Il m’a pourtant demandé de nombreuses années avant de le saisir dans son intégralité. Il m’était important de vous en parler aujourd’hui. Pour être honnête, c’est ce qui m’a permis de survivre. Oui survivre, et encore je pèse mes mots.
Vous l’avez certainement compris, la découverte de mon endométriose, a été une épreuve très éprouvante pour moi. J’étais très jeune, pas tout à fait une enfant, mais pas non plus une adulte : une adolescente. Et l’idée d’affronter une maladie me paraissant si « veille » me terrifiait. À tout moment j’avais l’impression que j’allais perdre pieds. C’était comme si mon corps ne m’appartenait plus, il était devenu un réel étranger à mes yeux. J’avais l’impression qu’il me faisait la guerre. Il fallait que je me batte contre lui en retour. Alors, pendant deux ans, jusqu’à ma première chirurgie; je me suis battue contre mon propre corps. Et vous l’aurez deviné, ce fut la pire des choses à faire.
Je n’étais pas du tout à l’écoute de mon corps. Nous étions devenues de vrais ennemis au lieu de former une équipe. Je n’acceptais pas du tout ma condition. Je n’acceptais pas la maladie. Je n’acceptais pas l’endométriose. Je n’acceptais rien. Avec le recul, ce manque de reconnaissance et de lucidité de ma part n’arrangeait pas mon état. Je tendrais même à penser qu’il pouvait, dans certains moments, l’empirer. En étant en perpétuelle ignorance de mon état, de ma fatigue et de mes douleurs, il finissait par me le faire payer. Ainsi, je pouvais parfois rester bloquée au lit pendant plusieurs jours voire plusieurs semaines. C’était comme si mon corps réclamait une pause : que je sois enfin à l’écoute. Il avait besoin d’attention, de repos et d’amour. Trois choses dont j’étais incapable de lui donner. Je n’irais pas jusqu’à dire que mon manque d’acceptation empirait les douleurs, loin de là. Mais il est vrai que notre mental, affecte énormément notre rapport à nous même, à notre corps et donc forcément à la maladie et aux douleurs.
Il a fallu attendre ma première opération pour que je me mette (enfin) à réfléchir sur mon rapport avec mon corps et donc avec moi-même. Jusque lors j’étais dans l’agressivité la plus total et le fait de me retrouver immobilisée après une intervention m’a faite prendre conscience que ce corps que je détestais tant était en réalité mon meilleur ami. Je devais en prendre grandement soin. Je me suis donc mise à le cajoler. Au départ c’était très minime, je m’occupais seulement des cicatrices. Puis peu à peu je me suis intéressée de plus prêt à mon alimentation, aux activités physiques, à tout ce qui impactait mon corps. Je rentrais donc dans le long chemin de l’acceptation de soi, et plus particulièrement de l’acceptation de l’endométriose (alias la garce).
C’est donc au bout de deux ans en tant qu’endogirl que j’ai fini par comprendre qui était vraiment l’ennemi à abattre dans cette histoire. Contrairement à ce que j’avais toujours pensé ce n’était pas mon corps. L’endométriose était ce fameux adversaire à qui il fallait faire la guerre. Ce corps, lui, n’était qu’une victime comme moi je le suis, je l’étais. Il fallait donc entamer une réconciliation pour former à nouveau une équipe. Nous avions besoin de devenir la dreamteam afin de nous battre ENSEMBLE contre l’endométriose. ENSEMBLE, nous pouvions gagner. Comme l’on dit souvent, «seul on avance vite, ensemble on avance plus loin ». Cette expression prenait tout son sens désormais. Je n’étais plus seule. Mon enveloppe corporelle était avec moi. Nous avions donc un ennemi commun et nous étions prêtes à l’anéantir.
Pourtant, malgré cette belle entente, je n’avais pas retenu la leçon. A vrai dire, je pensais avoir compris mais je n’avais capté que la face émergée de l’iceberg. En effet, pendant 1 an et demi l’endométriose a joué en retrait. Je n’avais plus aucun symptôme et j’avais repris une vie « normale ». Cependant, au bout de ce lapse de temps , au mois de janvier dernier, j’ai commencé à ravoir des signes de vie de cette garce, l’endométriose repointait le bout de son nez. Mais encore une fois j’étais dans l’ignorance. J’étais consciente qu’un jour ou l’autre la maladie pouvait revenir, mais j’étais persuadée d’avoir gagné la bataille. Si bien, que j’ai nié tous les signaux envoyés par mon corps, ce nouvel ami, pour me demander de l’aide. A cette période de ma vie j’avais d’autres préoccupations plus importantes à mes yeux que ma santé. J’ai donc volontairement et consciemment occulté le retour de la maladie, créant ainsi un nouveau faussé entre mon corps et moi. La communication était alors rompue.
J’ai continué dans cette lancée jusqu’au mois d’avril dernier. Lorsque les symptômes de la maladie sont revenus au quotidien, sans aucune interruption avec une intensité que je n’avais, jusque lors, jamais connue. Je suis donc allée voir mon spécialiste et il a confirmé ce dont je redoutais le plus : l’endométriose était bel et bien revenue. S’en est donc suivi une série d’IRM, d’échographies, de palpations, de rendez-vous pour confirmer que cette garce avait refait son nid et que cette fois-ci c’était pire. Il est vrai que concernant la gravité de ma rechute, il n’y avait pas de réelle surprise. Je sentais que les douleurs étaient différentes et bien plus intenses qu’il y a 2 ans. Je savais que quelque chose avait changé, que ce n’était plus vraiment la même chose. A vrai dire, moi aussi j’avais changé.
Un choix s’est donc imposé à moi. Je pouvais me conduire de la même façon qu’autrefois ou tenté de faire les choses différemment. J’ai donc pris la décision de m’abandonner à mon corps et de lui fournir l’écoute et l’attention la plus totales. Et bien je dois avouer que cela a tout changé. Certes les douleurs étaient affreuses et m’ont conduites plusieurs fois aux urgences en l’espace de quelques semaines. Mais grâce à ce changement de comportement et de rapport à moi-même, je vivais mieux la maladie. Je venais d’embrasser pour la toute première fois l’acceptation. Bien entendu cela ne guérit pas l’endométriose. Il a bien fallu que je subisse une deuxième opération. Mais disons qu’avec l’adoption de ce nouveau principe j’ai pu être plus sereine et j’ai gagné davantage en force pour pouvoir me battre contre la garce ; cette fois-ci main dans la main avec mon corps.
Cette acceptation a été de longue haleine. Mais je ne regrette en aucun cas d’avoir fait le travail nécessaire pour y parvenir. C’est ce qui m’a sauvée la deuxième fois et permise de me battre, ainsi que de remporter la bataille. Aujourd’hui, même si l’endométriose est endormie je continue d’être à l’écoute de moi-même et de m’accorder plus de valeur. Je fais tout ce qui est en mon pouvoir pour maintenir la garce le plus loin possible tout en respectant mon corps et mon esprit. Et je dois vous avouer que cela fait un bien fou ! Après tant d’épreuves et d’échecs, d’expériences et d’incompréhensions, je suis enfin en paix avec mon corps et donc avec moi-même. Je suis consciente que ce chemin peut paraître long, périlleux et surtout insurmontable. Bien souvent, nous nous sentons incapables de le réaliser. Mais croyez en mon expérience, nous sommes bien plus fortes que ce que nous pensons ! Nous sommes de vraies Warriors ! Croyez en vous. Moi je crois en vous toutes !
Love, Vic
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